
Le prêtre new-yorkais Benedict Groesche, qui a fait scandale en déclarant que certaines victimes d'agressions pédophiles avaient "séduit" leur agresseur. Photo : DR
Pédophilie : l'énorme dérapage d'un prêtre américain... Il s'est rétracté, évoquant sa sénilité, mais le scandale est là. Le père Groeschel a suggéré que les pédophiles sont parfois victimes, si l'on ose dire, d'enfants ou d'ados "séducteurs".
Depuis quelques jours la polémique monte outre-Atlantique. Dans une Amérique meurtrie par des scandales pédophiles entachant l'Eglise catholique, un prêtre vient publiquement d'alléguer que parfois les jeunes victimes d'agressions sexuelles sont en quelque sorte responsables de ce qu'elles ont subi.
Le discours impensable d'un prêtre sur un portail internet, l'un et l'autre réputés...
Prenant fait et cause pour un "pauvre homme", jugé coupable de multiples crimes pédophiles, le franciscain Benedict Groesche, figure respectée du diocèse de New York, a affirmé que les pédophiles n'étaient pas toujours des psychopathes au sang froid, des dangereux criminels, mais éventuellement n'avaient fait que répondre aux sollicitations d'enfants "séducteurs".
L'affaire fait d'autant plus de bruit que cet homme d'église de 79 ans, qui, comble du comble, peut se targuer d'être diplômé en psychologie, a tenu ces propos litigieux lors d'un entretien publié le 27 août sur le site du "
National Catholic Register", un média online réputé sérieux, qui en l'occurrence ne nie pas avoir fauté.
Un prêtre si bien sous tout rapport, qu'on ne l'a pas relu...
A la place de l'article en question, rapidement supprimé, on peut désormais lire les
plates excuses de la rédactrice en chef, Jeanette De Melo, expliquant comme elle le peut que l'interview du père Benedict Groesche, habitué de ses colonnes et au-dessus de tout soupçon, avait été publiée sans les précautions d'usages.
Au minimum, il aurait fallu demander au prêtre d'éclaircir sa position et lui apporter la contradiction reconnaît la journaliste qui clame en guise d'introduction que "la pédophilie n'est jamais excusable". Dont acte. C'est bon de le rappeler.
Une psychologie de comptoir qui fait froid dans le dos...
S'exprimant sur le sort de Jerry Sandursky, un entraîneur de foot américain, reconnu coupable en juin dernier des agressions de plusieurs adolescents, on pouvait lire il y a peu au même endroit, à propos des pédophiles, que "les gens ont à l’esprit une personne qui planifie, un psychopathe. Mais ce n’est pas le cas, imaginez qu’un homme fasse une dépression nerveuse, et que des jeunes viennent à lui"...
"Dans beaucoup de cas, le jeune (de 14, 16 ou 18 ans...) est le séducteur", affirmait le père Groesche, avançant sûr de lui une démonstration douteuse : "Ce n’est pas difficile à voir, un enfant qui cherche un père, car il n'en a pas eu. Il ne va pas chercher à avoir une relation sexuelle approfondie, mais plutôt à avoir une relation romantique, à enlacer, à embrasser, peut-être dormir, mais pas à avoir de rapports sexuels ou quelque chose de ce genre".
Pas de prison pour les primo-condamnés pédophiles ?
A propos de Jerry Sandusky en particulier, l'entraîneur de l'université de Penn State, en Pennsylvanie, qui pour la justice américaine a agressé au moins une dizaine de garçons ces quinze dernières années, le prêtre en a justement fait un argument.
"Ce pauvre homme a fait ça pendant des années. Pourquoi personne n’a rien dit ? Apparemment, certains enfants étaient au courant et n’ont rien dit", a déclaré l'interviewé, soulignant qu'il y a peu encore, "les gens n’avaient pas gravé dans leur esprit qu’il s’agit d’un crime". De là, sa conclusion, certainement odieuse à beaucoup : "Je suis enclin à penser, pour la première infraction, [que les pédophiles] ne devraient pas aller en prison parce que leur intention n’était pas de commettre un crime".
Les franciscains condamnent, l'incriminé s'excuse timidement...
Forcément ébranlé par un tel scandale, l'ordre des frères franciscains a fermement condamné les propos "inappropriés et faux" de Benedict Groeschel. "Un enfant n’est jamais responsable d’un abus. N’importe quel violeur est toujours responsable, en particulier s’il s’agit d’un prêtre. L’abus sexuel de mineur est un crime terrible, et devrait jours être traité comme tel", a ajouté sans appel la communauté religieuse.
De façon beaucoup plus laconique, frère Benedict, le prêtre incriminé a lui aussi fait machine-arrière, prenant pour excuse son âge.
"Mon intention n'était pas de mettre en cause la victime, écrit-il. Un prêtre [ou quiconque] qui abuse d'un mineur a toujours tort et est toujours responsable", a-t-il dit, regrettant "tout le mal" qu'il a pu causer par ses propos, assurant qu'il a passé sa vie au service d'autrui, et, expliquant le malentendu en ces termes : "Mon esprit et ma manière de m'exprimer ne sont plus aussi clairs qu'ils ne l'ont été".