Les nouveaux moyens de dissuasion pour les candidats à l’immigration : tests ADN..)
Tests ADN : un nouveau moyen de dissuasion pour les candidats à l’immigration ?
mardi 18 septembre 2007, par Maral Amiri
Les députés français ont débuté l’examen du projet de loi sur l’immigration
Les députés français ont commencé d’examiner, ce mardi, le projet de loi sur l’immigration défendu par le Ministre de l’Immigration, Brice Hortefeux. Y figure un amendement préconisant l’instauration de tests ADN pour les candidats au regroupement familial. Une mesure qui n’a rien de « tabou » pour M. Hortefeux, mais qui ne fait pas l’unanimité au sein de la classe politique, ni chez le corps scientifique et les associations de défense des Droits de l’Homme. Le Directeur du Pole Action sur la France à Amnesty International nous a livré son analyse.
Le test ADN ! Voila la dernière trouvaille ajoutée au projet de loi sur la maîtrise de l’immigration, de l’intégration et de l’asile, présenté par Brice Hortefeux, Ministre de l’Immigration, devant les députés, ce mardi, lors d’une séance extraordinaire au Parlement. Le projet de loi, qui vise à durcir les conditions de regroupement familial implique un amendement voté la semaine dernière par la commission des lois. Ce dernier encouragerait la réalisation de tests ADN sur les candidats au regroupement familial [1]. Une mesure clairement défendue par Brice Hortefeux mais qui a soulevé un tollé général dans une partie de la classe politique, parmi les scientifiques et les défenseurs des droits de l’Homme.
Une mesure incompatible avec la convention européenne des droits de l’Homme
Selon M.Delouvin,Directeur du Pole Action sur la France à Amnesty International, cet amendement pose différents problèmes. D’une part, il sous entend que les demandeurs de visa sont considérés comme des fraudeurs à qui l’on devrait faire passer un test génétique avant de poser un pied sur le territoire français. « Nous émettons une expresse réserve, a-t-il expliqué à Afrik.com, car une fois de plus on risque de voir les étrangers comme des fraudeurs. On va stigmatiser l’étranger, on va le montrer du doigt. Puis cette mesure va renforcer le pouvoir des consulats. »
D’autre part, l’application du test ADN est doublement discriminatoire. « C’est très coûteux, entre 200 et 600 euros, par conséquent discriminatoire. On va donc défavoriser les plus pauvres », a précisé M. Delouvin. Et du fait qu’il soit facultatif, on peut se demander si, le fait de ne pas s’y soumettre, ne vas pas automatiquement classer les réfractaires dans la catégorie des tricheurs.
C’est également une atteinte au droit constitutionnel. Actuellement, la règle est claire en matière d’ADN. Les tests d’identification génétiques sont autorisés suite à l’aval d’un juge lors d’un procès et pour motif médical. Alors va-t-on vers une énième modification de la loi ? Rappelons que les derniers durcissements des lois sur l’immigration remontent à moins d’un an…
« Cet amendement est incompatible avec la convention européenne des Droits de l’Homme, souligne M. Delouvin. Au lieu de protéger ces populations, qui sont dans des conditions déjà difficiles, cela va les exclure encore plus. » Cet amendement s’impose, selon lui, comme une véritable atteinte aux libertés individuelles. « Avec ces tests génétiques, on va révéler des affaires privées. Nous savons qu’il y a des douleurs dues à des viols, par exemple. Les tests ADN vont révéler des affaires bouleversantes pour certaines familles » indique le Directeur du Pole Action pour la France.
Des opposants à gauche…et à droite
Pour faire passer son projet, le Ministre de l’Immigration, Brice Hortefeux, va avoir du fil à retordre. En plus des habituels défenseurs des droits de l’Homme, Mr Immigration est confronté à un rejet de certaines personnalités du gouvernement et de la majorité. Fadela Amara, secrétaire d’Etat à la politique de la Ville y voit une pratique qui la « heurte » parce qu’elle « jette l’opprobre sur les étrangers qui veulent venir chez nous ». Bernard Kouchner, Ministre des Affaires étrangères, quant à lui, a déclaré que « cela ne [lui] plaît pas, mais ne [l]’indigne pas », avant de préciser au micro de RTL, dimanche, « que ce n’est pas comme cela qu’on règlera le problème de l’immigration ». « C’est une erreur politique », a indiqué François Goulard, le député UMP du Morbihan pour ensuite préciser qu’il « voterait contre » et qu’ « on ne peut pas imposer à des candidats à l’immigration des règles pas conformes à notre droit ». Et ce mardi, à au Parlement, le premier vice-président du groupe UMP, Jean Leonetti s’est interrogé sur la possibilité d’une aide en faveur des pays d’immigration pour optimiser leurs systèmes d’état civil et a proposé d’attendre la révision de la loi sur la bioéthique, programmée pour 2009.
Après les députés, qui depuis mardi après-midi, planchent sur le projet, ce sera au tour du Sénat de l’examiner à partir du 2 octobre prochain. Malgré les contestations, ce projet de loi qui s’inscrit dans les engagements pris par le Président Sarkozy en mai dernier pourrait bien passer comme une lettre à la Poste, au regard d’une majorité sénatoriale quasi-écrasante…
[1] La mise en place du test ADN est une proposition de Thierry Mariani, député UMP du Vaucluse, qui s’était déjà fait remarqué l’an passé pour avoir proposé de dépister les comportements délinquants chez les enfants, dès la maternelle. Le député a déclaré vouloir instaurer cette mesure afin de prouver la filiation des étrangers désirant s’installer dans l’Hexagone, avec en ligne de mire les populations africaines dont l’état-civil ne serait pas fiable.
Source : http://www.afrik.com/article12505.html
Le Sénat a adopté le projet de loi sur "la maîtrise de l'immigration"
Le Sénat a adopté le projet de loi sur "la maîtrise de l'immigration"
Sénat a adopté, dans la nuit de jeudi 4 à vendredi 5 octobre, par 188 voix contre 135, le projet de loi sur la "maîtrise de l'immigration", qui autorise notamment un recours, très contesté, aux tests ADN pour les candidats au regroupement familial. Les groupes UMP et une partie de l'Union centriste (UC) ont voté pour ce projet de loi présenté par Brice Hortefeux, ministre de l'immigration, et que les députés avaient adopté le 20 septembre. Les groupes de l'opposition – socialiste, communiste et apparentés –, ainsi que quelques élus de droite, ont voté contre ce texte controversé et critiqué – notamment la mesure concernant le recours aux tests ADN – par de nombreuses associations de défense des droits de l'homme.
Le Comité consultatif national d'éthique a estimé, dans un avis publié jeudi, que "cette inscription dans la loi d'une identification biologique réservée aux seuls étrangers" est "en contradiction avec l'esprit de la loi française".
Le gouvernement ayant demandé l'urgence sur ce texte, c'est-à-dire de réduire le nombre de navettes entre les deux assemblées, une commission mixte paritaire (CMP) sera convoquée le 16 octobre au Sénat. La CMP, où la droite est majoritaire, devrait parvenir à un accord sur un texte commun aux deux assemblées qui sera ensuite soumis, le 23 octobre, aux députés et sénateurs pour son adoption définitive.
REGROUPEMENT FAMILIAL
Les députés avaient voté, le 20 septembre, après un long débat et après l'avoir amendé à la demande du gouvernement, un amendement de l'UMP Thierry Mariani qui ouvrait la possibilité de recourir à des tests ADN afin de prouver une filiation dans le cadre d'une demande de regroupement familial. Plusieurs députés UMP et du Nouveau Centre (NC) avaient voté contre et plusieurs sénateurs UMP, comme Jean-Pierre Raffarin, avaient ensuite exprimé leur opposition à cette mesure.
L'amendement controversé a été rejeté le 26 septembre par la commission des lois du Sénat. Mais le président de cette commission, l'UMP Jean-Jacques Hyest, a présenté un nouvel amendement, sous-amendé par le gouvernement, qui a obtenu 18 voix pour et 18 voix contre. C'est cet amendement sous-amendé qui a été voté en séance par la Haute Assemblée dans la nuit de mercredi à jeudi par 176 voix contre 138 et qui est donc devenu un article du projet de loi. Il prévoit que la décision d'effectuer un test ADN sera soumise à une autorisation judiciaire et que ce test génétique, qui sera réalisé aux frais de l'Etat, est limité à la recherche d'une preuve de filiation avec la mère.
Outre le recours à des tests ADN qui a occulté le reste du texte, le projet de loi, qui vise à compléter les lois de 2003 et 2006 sur l'immigration, et qui reprend des engagements pris par Nicolas Sarkozy pendant sa campagne présidentielle, prévoit toute une série de mesures visant à rendre plus difficile le regroupement familial. Ainsi, il modifie les conditions de ressources en les indexant à la dimension de la famille et exige que toute personne de plus de 16 ans désireuse de venir en France au titre du regroupement familial se soumette à "une évaluation de son degré de connaissance de la langue et des valeurs de la République".
Le texte prévoit également la création d'un contrat familial pour les parents d'enfants bénéficiant d'un regroupement familial et place l'Office français des réfugiés et apatrides (Ofpra) sous la tutelle du ministère de l'immigration et non plus celle des affaires étrangères.
Source : LEMONDE.FR avec Reuters | 05.10.07
Charlie Hebdo et SOS Racisme lancent la pétition contre les tests ADN.
Charlie Hebdo et SOS Racisme lancent la pétition contre les tests ADN.
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En instaurant des tests ADN pour prouver une filiation dans le cadre d'un regroupement familial, l'amendement Mariani, adopté par l'Assemblée Nationale, fait entrer la génétique dans l'ère d'une utilisation non plus simplement médicale et judiciaire mais dorénavant dévolue au contrôle étatique.
Cette nouvelle donne pose trois séries de problèmes fondamentaux.
Tout d'abord, des problèmes d'ordre éthique. En effet, l'utilisation de tests ADN pour savoir si un enfant peut venir ou non rejoindre un parent en France pose d'emblée cette question : depuis quand la génétique va t'elle décider de qui a le droit ou non de s'établir sur un territoire ? Au-delà, depuis quand une famille devrait-elle se définir en termes génétiques ? Sont pères ou mères les personnes qui apportent amour, soin et éducation à ceux et celles qu'ils reconnaissent comme étant leurs enfants.
Ensuite, cet amendement fait voler en éclats le consensus précieux de la loi bioéthique qui éloignait les utilisations de la génétique contraires à notre idée de la civilisation et de la liberté.
Enfin, cet amendement s'inscrit dans un contexte de suspicion généralisée et récurrente envers les étrangers qui en vient désormais à menacer le vivre ensemble. Car tout le monde s'accorde à dire que la fraude au regroupement familial ne peut être que marginale au regard des chiffres d'enfants annuellement concernés et au regard de l'absence de raison substantielle qu'il y aurait à frauder dans ce domaine. En effet, quelle étrange raison pousserait les immigrés à faire venir massivement dans notre pays des enfants qu'ils sauraient ne pas être les leurs ? Autrement dit, l'amendement instaurant les tests ADN n'a pas pour fonction de lutter contre une fraude hypothétique mais bien de participer à cette vision des immigrés que nous récusons avec force.
Nous sommes donc face à un amendement qui, sur les plans éthique, scientifique et du vivre ensemble introduit des changements profondément négatifs. C'est pourquoi, nous, signataires de cette pétition, appelons le Président de la République et le Gouvernement à retirer cette disposition, sous peine de contribuer, en introduisant l'idée que l'on pourrait apporter une réponse biologique à une question politique, à briser durablement les conditions d'un débat démocratique, serein et constructif sur les questions liées à l'immigration.
Source : http://www.touchepasamonadn.com/